La découverte de la durée ou l'épreuve de la discordance
Résumé
Chez Bergson, l’effort philosophique ne consiste plus à sortir du temps et du monde sensible pour rejoindre une éternité immuable mais à entrer dans une durée, qui justement, de par son passage même, et de par l’imprévisible nouveauté qu’elle crée sans cesse, n’est déjà plus la même. D’une intuition à l’autre, tout change : ce n’est plus la même indivisibilité du passage qui est éprouvée. Aussi le commentateur qui voudrait sauter par-dessus cette pluralité d’intuitions (intuitions toujours nouvelles d’une durée toujours nouvelle) irait-il beaucoup trop vite. Celui qui prétendrait penser ainsi la Durée (fût-elle qualifiée alors d’une et de multiple, ou encore, de processus de différenciation) ne ferait que prendre les mots pour les choses. La difficulté est plutôt de « penser en durée » et de dire l’événement de l’expérience du mouvant dans son événementialité même, et non pas comme l’Événement qui nous arracherait, tout d’un bloc, à notre expérience courante et nous ferait retrouver, comme dans les métaphysiques de l’intuition intellectuelle, la fausse surprise d’une éternité immuable. Mais comment se figurer cela ?