Le Rouge aux joues – Virginité, interdits sexuels et rapports de genre au Maghreb - Université de Picardie Jules Verne Accéder directement au contenu
Ouvrages Année : 2013

Red in the cheeks - Virginity, sexual prohibitions and gender relations in the Maghreb

Le Rouge aux joues – Virginité, interdits sexuels et rapports de genre au Maghreb

Résumé

This published research is the result of a thesis for the Habilitation à Diriger des Recherches (HDR) in Sociology and Political Studies, defended at EHESS on 29 January 2013. It focuses on the representations of virginity in the literary works and testimonies collected through interviews (from 2005 to 2012) of (Franco-)Algerian and (Franco-)Moroccan women writers. It deals with the social conditions of speaking out and access to publication, and sociologically analyses the social trajectories and literary strategies of women writers who write about intimacy. The study is based on a literary corpus of more than 70 works that convey representations relating to gender and sexuality. I related them to the social realities they describe, on the basis of the - rare - statistical data available, secondary works (sociological and anthropological) on gender relations in the Maghreb countries, and also on some thirty sociological interviews in which the theme of virginity was spontaneously addressed by the women writers interviewed. The virginity of girls is a major issue of male and family honour, a specific - and sometimes unique - symbolic capital held by a clan and mobilised in the context of matrimonial transactions - it is exchanged for the dowry -, but it is also the keystone of the construction of the feminine in the Maghreb. It gives rise to processes of early socialisation, often allusive, in which older women, and in particular mothers, play a crucial role. I analysed the modalities and consequences of this in the second chapter: the rites of symbolic closure of the hymen, the verifications and certificates of virginity, the common representation of the wedding night as a "sacrificial rape", the "honour killings" against those who are not considered as virgins, themes that are all taken up in the literature. The third chapter details the particular configuration of the "black decade" in Algeria, and its literary translation: the so-called "emergency literature". I show what consequences this situation had on the writer's profession (exile, but also negotiations with French publishers who expected "sensationalist" works, featuring the violence of the civil war, or some women's writing that would be more "feminine" and/or orientalist), and then on the virgin women themselves, with the "marriages of enjoyment", described and denounced in many literary stories. The fourth chapter analyses the emergence of timid - and ambivalent - resistances by women to the control of their bodies (celibacy, sexuality outside marriage, surgical repair of hymens), which are also echoed by women writers, in a context of relative socio-cultural changes (increase in women's schooling and work, rise in the legal and average age for marriage, etc.). The last chapter is devoted to the resistance and literary strategies of women writers, who seek to distance themselves from orientalist stereotypes in their works, with varying degrees of success. Some of them, such as Nedjma, have tried to create heroines who do not accept gendered assignments, particularly in terms of gender roles. However, the subversion of male domination often remains relative.
Cette recherche, issue d'un mémoire d'Habilitation à Diriger des Recherches (HDR) en Sociologie et en Etudes politiques, soutenue à l'EHESS le 29 janvier 2013, porte sur les représentations de la virginité dans les œuvres et les témoignages recueillis par entretiens (de 2005 à 2012) d’écrivaines (franco-)algériennes et (franco-)marocaines. S’intéressant aux conditions sociales de la prise de parole et de l’accès à la publication, analysant sociologiquement les trajectoires sociales et les stratégies littéraires des écrivaines qui écrivent sur l’intime, elle s’appuie sur la lecture d’un corpus littéraire de plus de 70 œuvres véhiculant des représentations ayant trait au genre et à la sexualité, en les rapportant aux réalités sociales qu’elles décrivent, à partir des – rares – données statistiques disponibles, de travaux secondaires (sociologiques et anthropologiques) sur les rapports de sexe dans les pays du Maghreb, mais aussi d’une trentaine d’entretiens sociologiques, où le thème de la virginité a été spontanément abordé par les écrivaines enquêtées. La virginité des filles constitue à la fois, en effet, un enjeu majeur d’honneur masculin et familial, un capital symbolique spécifique, parfois unique, détenu par un clan et mobilisé dans le cadre des transactions matrimoniales – il s’échange contre la dot –, mais elle est aussi la clef de voûte de la construction du féminin au Maghreb. Elle donne lieu à des processus de socialisation précoce, souvent allusive, dans lesquels les aînées, et notamment les mères, tiennent une place cruciale. J’en analyse les modalités et les conséquences dans le deuxième chapitre : les rites de clôture symbolique de l’hymen, les vérifications et certificats de virginité, la représentation commune de la nuit de noce comme « viol sacrificiel », les « crimes d’honneur » à l’encontre de celles qui ne sont pas considérées comme vierges, thèmes tous repris dans la littérature... Le troisième chapitre détaille la configuration particulière de la « décennie noire » en Algérie, et sa traduction littéraire : la littérature dite « d’urgence ». Je montre ce que cette conjoncture entraîne comme conséquences sur le métier d’écrivain (l’exil, mais aussi les négociations avec les éditeurs français qui attendent des œuvres « sensationnalistes », mettant en scène les violences de la guerre civile, ou dont l’écriture serait plus « féminine » et/ou orientaliste), puis sur les femmes vierges elles-mêmes, avec les « mariages de jouissance », décrits et dénoncés dans de nombreux récits. Le quatrième chapitre analyse l’apparition de résistances timides – et ambivalentes – des femmes au contrôle des corps (célibat, sexualité hors mariage, réfections chirurgicales des hymens), dont se font également écho les écrivaines, dans un contexte d’évolutions socioculturelles relatives (progression de la scolarisation et du travail des femmes, élévation de l’âge légal et moyen au mariage…). Le dernier chapitre est consacré aux résistances et stratégies littéraires des écrivaines, qui cherchent notamment à se démarquer des stéréotypes orientalistes dans leurs œuvres, avec plus ou moins de fortune. Certaines, telles Nedjma, s’attachent ainsi à construire des héroïnes n’endossant pas les assignations genrées, notamment en matière de rôles sexuels. Toutefois, la subversion de la domination masculine y demeure souvent relative.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03685787 , version 1 (02-06-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03685787 , version 1

Citer

Isabelle Charpentier. Le Rouge aux joues – Virginité, interdits sexuels et rapports de genre au Maghreb : Une étude d’œuvres et de témoignages d’écrivaines (franco-)algériennes et (franco-)marocaines. Publications de l'Université de Saint-Etienne. pp.333, 2013, Littératures postcoloniales – Long-courriers ; sous-collection Essais, Yves Clavaron et Evelyne LLoze, 2862726303. ⟨hal-03685787⟩
35 Consultations
0 Téléchargements

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More